A ma fenêtre, il y a un balcon
C’est là que s’entassaient pots vides et pots pleins.
La table de jardin en marbre de la maison de mes parents.
Le marbre, c’est beau, mais avec tous ces déménagements
La question de son poids comparé à son utilité s’est posée.
A ma fenêtre, sur le balcon,
s’amenuisaient mes rêves d’un îlot fleuri,
qui se substituerait, bien timidement peut-être
A mon désir obsédant de nature et de campagne
Balancé, comme le reste, par mon besoin contrit de ville.
A ma fenêtre, accrochées au balcon,
Voilà, les jardinières, craquelées par les ans, qui s’animent
piquetées de mauve, de vert, de blanc, toutes sortes de nuances
Qui s’élancent côte à côte, printemps et confinement concomitants ;
pétales, feuillages, boutons et tiges , ont jailli, à mon grand étonnement.
A ma fenêtre, debout sur mon balcon, chaque soir à 20 heures,
J’applaudis les aidants, ces Héros des temps présents, les effacés
les exploités, les sacrifiés de notre société que tout le monde veut désormais honorer.
Et voilà que je ne suis pas la seule à vouloir les embrasser. De chaque côté de la trouée
Qui s’ouvre vers le ciel étoilé, des gens des immeubles à côté, avec qui on s’est jamais parlé
De leurs fenêtres, à mon balcon
Me renvoient des bravos, des you you, du djembé, et les bébés des bisous.
Habitants du quartier, jamais rencontrés, chacun sa vie derrière les rideaux tirés.
Quand un manque à l’appel, comme chantait Georges, inquiet, on scrute leur arrivée.
Mais que s’est-il donc passé ? Nous sommes nombreux, les soirs à la fenêtre .
De nos fenêtres ouvertes se sont échappées
Des bouffées de solidarité, des élans de fraternité. Dans la rue je saurai les reconnaître
Ces voisins si longtemps ignorés. Bien sûr, du jour au lendemain, le monde ne sera pas transformé.*
Mais voilà le balcon nettoyé et rangé, de nouvelles plantes ont été installées, les vieux pots jetés
Et des graines semées. Merci à mon compagnon pour ces instants partagés, et pour l’espoir
De voir des radis pousser….
Huguette, au balcon. 27/04/20